lundi 17 octobre 2011

Les deux faces mystérieuses de la peur


Quel beau métier que celui du théâtre, mystérieux et attirant dans sa simplicité, comme s'il suffisait d'ouvrir une montre suisse et d'en observer le mécanisme minutieux pour deviner ce qu'est le temps. « D'abord la scène, le décor, la matière, ensuite le texte, sa poésie rayonnante, raisonnant ou pas avec la mise en scène et les comédiens ! », semblent chuchoter ces images. N'est-ce pas l'inverse ? De l'un à l'autre sur l'échelle du temps, parents-enfants sans discontinuité, auteur, metteur en scène, comédiens, nous nous trouvons par les mots et nous réunissons pour sentir la chaleur entre nous, créer la surprise inouïe d'un nouveau visage, un nom à trouver sans dissemblance entre les caresses de maman, sa musique omniprésente, la barbe nouvellement abrasives et les rires solidaires de papa. Vladimir, le beau-frère de Laure, qui a l'âge de Lucien, commence cette années des études d'urbanisme et de géo-socio-politique dans une école à Créteil. « Gaston Bachelard prétend que l'espace, c'est du temps condensé », nous dit-il en rentrant de l'anniversaire de Lucile à Magny-le Hongre, la maman de Laure et Solène, hier, sur le quai du RER pour Paris à la nuit tombée. L'espace est-il une sorte de photographie du temps ? Vladimir se poste avec ses camarades sur la Place St-Paul dans le 4e arrondissement à différentes heures de la journée et saisons de l'année, puis en observant le flux des passants ils prennent des notes qu'ils collationnent aux devoirs des élèves qui les ont précédés dans cette classe, à la même Place St-Paul. L'espace serait-il une abstraction non réaliste, un instant donné sans rapport avec aucune vérité sinon celle de l'objectif, du contingent, du fugace mais surtout de l'absurde sans amour, dont nous nous saisissons pour construire le monde dans une fuite ou la domination, ou les deux à la fois, comme les deux faces d'une même peur ? [Photos, Nancy Huston au Théâtre Kléber-Méleau, Lausanne, première le 2 novembre 2011, avec Chloé Réjon, décors de Jean-Marc Stehlé, kleber-meleau.ch]

vendredi 14 octobre 2011

La mort de Saint Juste

Qui donc écrivait :

« L'art du samouraï, c'est la patience et la force de transformer chaque mauvaise nouvelle, systématiquement, en bonne nouvelle. C'est l'art difficile de savoir accepter la contrainte sur le chemin de l'élévation, modifiant et poursuivant ce mouvement sans faillir et sans perdre la face, jamais, nulle part, sachant néanmoins que cela demeure possible et s'y préparant sans y penser. C'est l'art et la patience de n'ignorer et de n'oublier aucune fleur fanée faisant partie de l'Histoire, aucun diadème dans les palais, aucun grain de sable en suspension dans l'air, ni aucun bouton de rose au fond du caniveau. Le cœur blessé du samouraï, c'est son ultime force et son attention décuplée, miraculeuse, d'homme vivant ! »

Est-ce Lear à Cordélia dans la nouvelle traduction de monsieur Y, inédite ? Paul dans Je suis l'Indien donné en lecture le 5 mai 2010 chez Karen et Neil Gurry à Belleville, à l'intention de Louis Yerly qui a construit la Tour
Vagabonde ? Pascal Greggory s'adressant à Vanessa Aiffe dans un film réalisé par Bruno Joseph Roy ? Est-ce le Capitaine Forban de la ThSV ce dimanche chez Charlotte-Rita Pichon, Lyazid Khimoum s'inventant Laure Carrale comme une alliée et la meilleure amie du monde ?

[Le meurtrier s'était réfugié dans une église. A l'extérieur, le peuple de Lyon criait A mort ! et menaçait d'incendier l'édifice. L'évêque intervint auprès des autorités. Il reçut l'assurance formelle que l'homme aurait la vie sauve. L'assassin consentit alors à se livrer. Il fut jugé et exécuté. Saint Juste n'avait qu'une parole, pour lui un oui était un oui, un non un non. Il ne supporta pas d'avoir été complice, même involontairement, de la mort d'un homme qui bénéficiait du droit d'asile. C'est ainsi que Saint Juste mourut dans un désert d'Egypte dans les premières années du Ve siècle. Il est fêté ce jour, le 14 octobre.]